L’annonce de la remise en service de l’InterCity et son voyage inaugural crée un mouvement de raillerie sur le chemin de fer de notre pays et par conséquent sur la politique du transport par voie ferrée du gouvernement camerounais.
Sur l’image en illustration, on distingue clairement le Président Ahmadou Ahidjo qu’accompagne le Président français George Pompidou. Nous sommes en 1971, et c’est l’inauguration d’une ligne de train de la défunte Régifercam (la société camerounaise de gestion du rail). C’est un jour de fête. Le Cameroun fait un pas vers la modernité de cette époque. Notre pays, qui se veut avant gardiste, s’offre un outil de transport des biens et des personnes, qui il y a 50 ans constituaient une véritable innovation.
Mis à part un écran Led installé au fond du wagon, c’est exactement le même train que les autorités camerounaises présentent 50 ans plus tard pour célébrer la reprise du transport par rail entre les villes de Yaoundé et Douala. C’est hilarant. Et le monde entier se donne à cœur joie pour rire de ce que le Cameroun célèbre en 2020 comme outil de transport entre les deux principales villes du pays, la capitale politique et la capitale économique.
21 octobre 2016, autour de 13h30, ce train que le gouvernement camerounais célèbre a tout rompre a tué plus d’une centaine de camerounais, et fait près d’un millier de blessés. Sans qu’il y ait eu de changement notoire, les autorités camerounaises remettent sur les rails, les mêmes engins qui ont tués et mutilés des centaines de citoyens. On aura attendu quatre ans pour rien. Et pourtant, les voyageurs par le train croyaient que la fermeture du service du transport des personnes par Camrail devait permettre une véritable innovation dans le secteur. On repart avec des rails loin des standards internationaux, des wagons vétustes, des entrées préhistoriques, et des installations qui vont une fois de plus nous conduire vers le même drame que 2016.
Réagissant dans le journal français « l’Humanité » le 23 octobre 2016, au lendemain de l’accident ferroviaire d’Eseka, Jean Marc BIKOKO faisait remarquer que « les voies du réseau ferroviaire camerounais sont très étroites, très loin des standards internationaux. Alors que l’écartement conventionnel conforme à la convention de Berne du 10 Mai 1886 est de 1,435 m (1435 mm), l’écartement du rail au Cameroun est de 1000 mm. Au vu de l’étroitesse de la voie, il va de soi que la vitesse des trains est extrêmement réduite, ce qui justifie la durée assez longue des voyages. La durée du trajet Yaoundé-Ngaoundéré long de 653 km est de 15 à 20 heures, tandis que celle du trajet Douala-Yaoundé long de 265 km est de 5 heures. » Quatre ans plus tard, rien ne change. On prend les mêmes choses et on recommence.
Stéphane NZESSEU