Les chefs traditionnels en l’état actuel de la loi restent des subordonnés de l’administration. Mais la nouvelle décentralisation fait d’eux, des acteurs prépondérants de l’architecture de la décentralisation régionale.
Les chefs traditionnels sont désormais au cœur d’un tourbillon administratif au Cameroun. Après avoir été fait auxiliaire de l’administration, un salaire a été défini pour rémunérer ces derniers. Question de conforter la domination administrative qui devra peser sur ces dépositaires du pouvoir traditionnel. Ce dispositif a simplement permis d’assoir la tutelle de l’administration territoriale sur cette entité. Les chefs traditionnels sont donc, on peut le dire, des agents de l’Etat.
Sans être départi de ce manteau, les gardiens de l’ancestralité ont été embarqué dans un autre processus où ils ont vu leur pouvoir être davantage dégradé, et l’assujettissement plus grandement conforté. En 2013, avec la mise en place du SENAT, le gouvernement avait préservé la légitimité et l’autorité de ces chefs traditionnels en les épargnant du processus électoral et en choisissant le moyen de la nomination pour les installer au sein de la chambre haute de notre pays. Un mécanisme qui octroyait une certaine noblesse à ces sages, et patriarches.
Or, cette année, avec les élections régionales, le gouvernement camerounais a décidé de faire compétir les chefs traditionnels entre eux. On a vu des chefs battre campagne auprès d’autres chefs et d’autres de leurs sujets pour que ces derniers les intronisent au sein du conseil régional. Une déformation et une dégradation de l’autorité traditionnelle. Finalement, les chefs traditionnels, au sein du conseil régional continuent d’être les auxiliaires de l’administration. Ils doivent au même moment rendre compte à l’administration, mais aussi au conseil régional constitué de sujets. Sans oublier que désormais ceux-ci ont sur leur tête le ministre de la décentralisation comme tutelle administrative.
Qui est finalement le chef traditionnel au Cameroun ? Quel est son pouvoir ? Maintenant que ces derniers sont au même moment auxiliaire de l’administration et salarié, soumis à l’autorité du Sous préfet ; au même moment, législateur pour le compte de la région. On a simplement envie de se demander si ce n’est pas le même gouvernement qui compte administrer les régions au travers des partis politiques qui ont la main mise sur le conseil, mais aussi au travers des chefs traditionnels. Les chefs traditionnels, progressivement risques d’être réduits complètement au silence dans notre pays. Vigilance !
Stéphane NZESSEU