Un constat qui amène le président sud-africain Cyril Ramaphosa à promettre la création des emplois et, l’éradication de la corruption.
« Nous avons tiré les leçons (du scrutin), nous avons entendu le peuple d’Afrique du Sud, nous avons bien compris ce qu’ils attendent de nous ». Une déclaration faite devant des centaines de personnes réunies devant le quartier général de l’ANC, dans le centre de Johannesburg.
C’est vendredi dernier que le verdict des urnes est tombé. L'ANC l'a emporté avec 57,5% des suffrages, loin devant l'Alliance démocratique (DA, centre) avec 20,7% et les Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale) avec 10,7%. Ce qui lui assure une majorité absolue de 230 des 400 sièges de l’Assemblée nationale.
Cette victoire assure au mouvement historique de Nelson Mandela, le renouvellement de sa majorité absolue à l'Assemblée nationale, ainsi qu'un nouveau mandat de chef de l'Etat à son chef Cyril Ramaphosa.
Mais elle confirme aussi son déclin continu depuis qu'il a pris le pouvoir à la chute de l'apartheid en 1994. Le parti avait recueilli 70% des voix aux législatives de 2004, 66% en 2009, 62% en 2014.
Lors des élections locales il y a deux ans, il avait touché le fond en totalisant 54% des suffrages au niveau national : « Ce n'est pas vraiment une baisse car en 2016 nous avions moins (que 57,5%). C'est plutôt un progrès », a fait remarquer à l'AFP la secrétaire générale adjointe de l'ANC Jessie Duarte.
« Nous sommes satisfaits d'avoir reçu un nouveau mandat pour gouverner et nous l'exercerons en gardant à l'esprit ce que le peuple nous a dit avant le scrutin plus merci de ce que vous avez fait pendant vingt-cinq ans mais vous devez faire mieux et corriger ce qui ne va pas », a-t-elle ajouté.
Pendant des mois, la campagne électorale a résonné de l'impatience et de la colère d'une part croissance de la population, excédée par la corruption, le chômage de masse (27%) et à les inégalités sociales criantes qui persistent.
Cyril Ramaphosa
Modéré et pragmatique, il est âgé de 66 ans. Il a promis de réparer les erreurs du parti sous l'ère de son prédécesseur Jacob Zuma, englué dans une litanie de scandales politico-financiers. Elu chef de l'ANC fin 2017, C. Ramaphosa l'avait contraint à la démission deux mois après et pris les rênes du pays.
Syndicaliste sous l'apartheid avant de devenir l'un des hommes d'affaires les plus riches du pays, il répète depuis qu'il va éradiquer la corruption et relancer l'économie. Son discours a permis de retenir de nombreux électeurs déçus dans le giron de l'ANC, estiment les analystes : « L'ANC a reculé, c'est vrai (...) mais il finit à un niveau nettement supérieur à celui qu'il aurait eu si Zuma avait été encore été au pouvoir », a noté l'analyste Susan Booysen, de l'université du Witwatersrand à Johannesburg.
« Mais le score de 57,5% obtenu par l'ANC, sa plus faible performance législative, offre toutefois au chef de l'Etat un "mandat fragile », selon Susan Booysen.
Les analystes anticipent de fortes résistances à ses velléités de réforme au sein de la direction de l'ANC, le véritable siège du pouvoir, où les partisans de l'ex-président Zuma, bien décidés à se défendre, gardent une forte influence.
Le chef de la DA Mmusi Maimane a déjà pronostiqué son échec : « Le parti au pouvoir a réussi à installer un nouveau chauffeur dans un autobus qui est cassé », a-t-il résumé vendredi.
« Ramaphosa doit utiliser sa victoire pour transformer la base de réforme qu'il promeut depuis un an en tremplin pour la croissance économique et la création d'emplois Sinon (...) les électeurs lui diront (aux législatives de 2024) que c'en est assez et ils tourneront le dos à l'ANC », a estimé pour sa part l'analyste Richard Calland, de l'université du Cap.
Nicole Ricci Minyem