Ces entailles sur le visage, considérées par d’aucuns comme des pratiques ancestrales restent encore d’actualité chez certains peuples dans la région du Nord-Cameroun. Jeunes ou moins jeunes portent des balafres pour diverses raisons en fonction des valeurs socioculturelles voire à titre thérapeutique.
Visage rond, les yeux captivants comme ceux d’une femme affichant un air jovial, « Dada Fadi », comme l’appelle affectueusement ses connaissances fouillent dans ses souvenirs les raisons profondes qui ont poussé sa mère à la marquer d’une longue entaille sur le front et de part et d’autre de ses joues. « Je suis de tribu Guiziga. J’étais très malade quand j’étais petite, ma maman m’a fait cette entaille et j’ai retrouvé la guérison », nous confie cette dame, la quarantaine bien sonnée.
Comme chez les Guiziga, plusieurs autres tribus dans la partie septentrionale du pays recourent à ces types de scarifications pour des raisons précises. C’est à ce titre que Tchoing Wassouo, jeune étudiant a accepté de nous expliquer pourquoi, il s’est retrouvé avec des balafres sur le visage. « Je suis de tribu Moudang. C’est depuis ma prime enfance que je porte ces entailles. Dans ma généalogie, mon père et mon grand-père avaient aussi ces traits sur leur visage. A la question de savoir pourquoi ces balafres, mon grand-père m’a répondu qu’il s’agit tout simplement d’un signe d’honneur », dit Tchoing Wassoua. Quant à Joseph Baïmele de tribu Dowayo : « Chez-nous, les deux traits sous forme de guillemets sur la joue symbolise la valeur de l’homme partout où il va. Les traits droits sur le visage renvoient à une protection contre le paludisme », à en croire Joseph Baïmele.
Le choix de mettre les balafres sur le visage pour plus d’un, est fait à dessein. « Chez-nous les fali, les balafres étaient considérées à une époque comme des signes de beauté. Une femme qui ne les avait pas était considérée comme une peureuse. C’étaient des hommes qui nous entaillaient le visage », déclare Djoumba Féonandé.
Les objets utilisés
Dans la logique des scarifications concernant les balafres, d’aucuns font recours à des produits naturels, d’autres par contre font usage des objets susceptibles de les faire saigner. « Avant, nos parents utilisaient des objets tranchants qu’ils prenaient le soin de bien faire limer. Aujourd'hui, les balafres sont faites à l’aide des lames de rasoir. Je sais aussi qu’il y a d’autres qui utilisent plutôt la sève des noix de cajou pour se faire scarifier le visage », précise Joseph Baïmele.
Il convient de remarquer que les balafres peuvent au fil du temps se confondre aux rides. Cependant, elles ne semblent pas pour autant disparaître complètement de la société dans la région du Nord-Cameroun, car les balafres chez certains peuples sont transmises de génération en génération.
Innocent D H