Cette restitution concerne les patrimoines matériels emportés du Cameroun par la France pendant la période coloniale. Il s’agit des objets de rites, de cultes, de décorations et des biens qui appartenant aux chefferies.
Des biens patrimoniaux, ont été repérés dans plusieurs musées occidentaux. Le rapport de Bénédicte Savoy et Felwine Sarr sur «La restitution du patrimoine culturel africain. Vers une nouvelle éthique relationnelle», révèle que la France en possède environ 90.000 objets d’art africains dans ses collections nationales, très majoritairement conservées au Quai-Branly, le musée ouvert par l’ancien président Jacques Chirac en 2006 qui abrite environ 70 000 œuvres d’origine africaine.
Si l’on en croit Repères en kiosque le 5 décembre 2018, le rapport récence spécifiquement en France, 7838 œuvres d’art d’origine camerounaise. Et même observation est faite au musée de Bremen en Allemagne, où des milliers d’objets d’art ont été répertoriés. A l’observation, les premières œuvres qui sont en voie de retour sont des objets sacrés, des instruments de musique et bien d’autres.
C’est le cas du siège du 11e roi Bamoun arraché par des militaires français en 1925 et autres milliers de patrimoines culturels semblables seront rapatriés au Cameroun. Le transfert de ces pièces devrait être effectué, si les pays d'origine considèrent déjà qu'ils sont en mesure de les recevoir. Le rapatriement d‘objets d’art constitue un pan pour redéfinir l’histoire du Cameroun et des peuples qui la compose.
Interrogé par le journal, le Pr David Simo, responsable de la coopération scientifique entre l’Afrique et l’Allemagne estime qu’ «il y a une nécessité de prendre les objets volés comme la mémoire d’une histoire». Pour cause, ces biens patrimoniaux constituent notamment une modalité d’explication du présent et participent au travail de reconstruction généalogique.
Une partie de l’âme des Camerounais qui a été arrachée et ce n’était pas dans certaines mesure de leur plein gré. D’où l’importance de la restitution des biens emportés pour créer une stabilité. En outre, ces objets d’art pourront redéfinir les bases de construction d’un espace de vivre ensemble.
Le retour dans le pays d’origine des objets et documents qui sont les témoins indispensables à la compréhension par chaque peuple de ses racines et de sa culture. Ainsi, la restitution permet de retrouver un pan de l’histoire d’un peuple et de consolider une identité ethnique ou nationale autour d’un patrimoine culturel propre. Ces objets d’art jouent un rôle important dans la formation des identités, que celles-ci soient collectives ou individuelles et ils constituent un élément intégrateur.
Il faut le dire, en préconisant la restitution de leur patrimoine aux pays qui en feraient la demande, l’universitaire sénégalais Felwine Sarr et la Française Bénédicte Savoy ont jeté un pavé dans la mare. Dans leurs recommandations, les auteurs du rapport préconisent «la restitution rapide» des objets prélevés en Afrique par la force ou « présumés acquis dans des conditions inéquitables ».
Rentrent dans cette définition les objets saisis « lors d’affrontements militaires », ceux acquis « par des personnels militaires ou administratifs actifs sur le continent pendant la période coloniale (1885-1960) ou par leurs descendants ». Idem pour les pièces récupérées « lors de missions scientifiques antérieures à 1960 ». Les objets « oubliés » – c’est-à-dire qui avaient été prêtés par des institutions africaines à certains musées pour des expositions ou des campagnes de restauration mais n’ont jamais été rendus – sont aussi concernés.
Bénédicte Savoy et Felwine Sarr proposent de restituer en trois étapes le patrimoine culturel africain présent sur le sol français. La première, qui s’étend de novembre 2018 à novembre 2019, permettra de remettre aux États africains concernés « des inventaires d’œuvres issues de leur territoire (selon les frontières actuelles) et conservées actuellement dans les collections publiques françaises ».
Une deuxième, du printemps 2019 à novembre 2022, et qui se découpe en quatre volets distincts, « doit conduire à la mise en ligne en libre accès, ou à la restitution bien ordonnée, d’ici cinq ans, du matériel iconographique, cinématographique et sonore concernant les sociétés africaines ».
Enfin la troisième et dernière étape commencera à partir de novembre 2022. Pour les auteurs, le processus de restitution ne doit pas être limité dans le temps. « Il faut éviter de donner l’impression que la fenêtre historique qui s’est ouverte lors du discours de Ouagadougou risque de se refermer très vite », écrivent-ils.
Otric N.