«Basique», «naguère», «assassinat»... Nous croyons en connaître le sens exact et pourtant, les employons à tort dans nos conversations du quotidien. Nous vous proposons de revenir sur ces termes qui ne signifient pas vraiment ce que vous pensiez.
Chers lecteurs, en ce dimanche, la rédaction vous propose de sonder les nuances de la langue française. Celles qui nous induisent en erreur, nous poussent à employer des mots à la place d'autres ou pis, à confondre des termes que nous croyions synonymes. Quelle différence faites-vous entre «récalcitrant» et «réticent»? Entre «Ivre» et «soûl»? Aucune? Et pourtant, croyez donc que leur sens diffère fondamentalement. Le Figaro vous propose un tour d'horizon de ces mots que vous utilisez mal sans le savoir.
● Basique ou fondamental?
Dans nos conversations du quotidien, nous utilisons ce terme pour décrire ce qui est «fondamental», «élémentaire», «primitif». Jusqu'à avoir recours à l'anglicisme «basiquement», le mot anglais étant basically. Mais comme le rappelle l'Académie française dans sa rubrique Dire/ ne pas dire, cet adjectif «appartient au vocabulaire de la chimie et qualifie une substance qui a les propriétés d'une base; en minéralogie, il sert à caractériser une roche contenant au moins cinquante-cinq pour cent de silice.»
● Postuler à ou postuler pour?
Le verbe «postuler» est utilisé de manière intransitive dans un contexte juridique. En l'occurrence, on parle de «postuler devant une cour d'appel». Mais si le verbe «postuler» est au transitif, il signifie «tenir pour acquis». Les sages donnent cet exemple: «Les Anciens postulaient que la terre était plate».
Mais si vous cherchez un emploi, vous ne postulez ni «à quelque chose» ni «pour» (ici, le verbe est transitif), mais «je postule un métier». C'est étrange, mais c'est ainsi.
● Opportunité ou occasion?
Nous faisons l'erreur dans nos lettres de motivation. «Un stage au sein de votre entreprise me donnerait l'opportunité de...» En anglais, opportunity désigne bien «occasion» ou encore, «chance». Mais en français, ce mot définit le «caractère de ce qui est opportun». Ce qui est à propos. «Occasion», du latin occasiun, «raison, motif» est une «circonstance favorable». Préférons ainsi cette formulation: «Un stage au sein de votre entreprise serait une occasion de...»
● Récalcitrant ou réticent?
La nuance est subtile mais fondamentale. En effet, quelle différence faire entre quelqu'un qui est «récalcitrant» et quelqu'un de «réticent»? Tout est question de degré. Emprunté au latin recalcitrare, dérivé du verbe calcitrare, «ruer», on parle par exemple d'un cheval qui «résiste en ruant, en se cabrant». Ainsi, comme le dénote Le Trésor de la langue française, une personne «récalcitrante» est celle qui «résiste avec opiniâtreté».
La réticence, elle, désigne une «réserve mêlée de désapprobation; qui fait preuve de peu de zèle». Du latin reticentia, «fait de taire quelque chose, silence», une personne réticente paraît moins colérique, moins têtue.
● Ivre ou soûl?
L'un relève d'un état de trouble, l'autre, de l'indécence. Comme le relève Jean-Loup Chiflet dans son ouvrage Les nuances de la langue française (Le Figaro), «soûl» vient du latin satur qui signifie rassasié. «Celui qui est soûl ne fait pas dans le détail, et quand il boit ‘‘du brutal'', il a mal aux cheveux, il a la bouche pâteuse.» Quand on est ivre, en revanche, «on ne sera jamais bourré, c'est trop vulgaire. Juste un peu éméché».
● Naguère ou jadis?
Certes, le terme est vieillot mais il n'empêche que nous le confondons systématiquement avec un autre marqueur temporel, à savoir «jadis». Selon Le Trésor de la langue française, le premier est la contraction de la locution il n'y a guère (de temps), «guère» signifiant «pas très». Ainsi, «il n'y a guère» est une formule qui appartient au passé proche.
«Jadis», issu de ja a dis «il y a des jours», est un adverbe qui désigne «un passé plus ou moins lointain; il y a longtemps». Subtil, direz-vous? Pas selon Verlaine qui, en 1884, a écrit un recueil de poèmes intitulé Jadis et Naguère.
● Meurtre ou assassinat?
Un assassinat est «une action qui se prémédite». En 1560, un assassin est «un individu gagé pour un meurtre». Le meurtrier, lui, «est un apprenti dans le domaine du crime, l'assassin est un artiste, un pro», relève Jean-Loup Chiflet. Meurtre» est construit sur le mot latin murdre qui signifie simplement «homicide».
Otric N. avec Le Figaro