Le principal opposant camerounais, Maurice Kamto, arrêté lundi soir après des manifestations non autorisées de son parti, va faire l'objet d'une enquête notamment pour «rébellion» et «incitation à l'insurrection», ont indiqué ses avocats lors d’une conférence de presse dans la nuit de mercredi à jeudi.
Au total, huit infractions sont imputées à M. Kamto, arrivé deuxième à la présidentielle d'octobre derrière le président Paul Biya: «l'attroupement, la rébellion en groupe, l'hostilité à la patrie, insurrection, le trouble à l'ordre public, l'association de malfaiteurs, l'incitation à l'insurrection, la complicité», a déclaré l'un de ses quinze avocats, Me Sylvain Souop.
«Ces huit infractions sont reprochées à toutes les autres personnes qui font l'objet d'enquêtes préliminaires», soit «200 interpellés», a précisé Me Souop. «Il y a une qualification des faits avant même que les gens aient été entendus», a-t-il dénoncé.
L'avocat a indiqué avoir rencontré mercredi après-midi Maurice Kamto, détenu au Groupement spécial d'opérations (GSO), une unité d'élite de la police. «Il va bien, il a le moral, il est serein et il a été entendu (mercredi après-midi) en présence du directeur général de la Police judiciaire», a déclaré Me Souop.
Lors du point de presse, le parti de Maurice Kamto, le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), a démenti avoir organisé samedi des manifestations à l'étranger durant lesquelles plusieurs ambassades en Europe ont été saccagées par des manifestants. «Kamto dénonce ce vandalisme des représentations diplomatiques, il n'a jamais envoyé qui que ce soit casser quoi que ce soit», a affirmé Me Souop. M. Kamto, ancien ministre de la Justice de Paul Biya, «fait confiance à la justice du Cameroun», a conclu son avocat.
Maurice Kamto et plusieurs cadres de son parti avaient été arrêtés lundi soir à Douala et Yaoundé, deux jours après qu'une centaine de militants du parti, selon les autorités, eurent été interpellés samedi lors de marches non autorisées. Deux journalistes camerounais ont aussi été interpellés lundi soir, après avoir été «confondus avec des activistes politiques dans l'exercice de leurs fonctions», selon le syndicat des journalistes camerounais. Ils étaient toujours détenus jeudi.
Depuis l'annonce des résultats de la présidentielle, fin octobre, plusieurs manifestations non-autorisées ont été organisées par le MRC contre ce qu'il qualifie de «hold-up électoral».
«Nous avons le droit de dire «non» pour la jeunesse camerounaise, pour nos enfants. C’est pourquoi nous sommes debout. Nous aurions pu rester tranquilles, être avec eux. Mais nous n’avons pas le droit de priver la jeunesse camerounaise d’un avenir. Nous sommes là, nous serons à côté de vous jusqu’au bout», a déclaré Maurice Kamto lors d’une marche à Douala le 26 janvier 2019.
«J’ai décidé de me sacrifier pour mes enfants. Nous allons nous battre jusqu’à vous laisser un pays en bon ordre. Ces gens-là ne dormiront plus tranquilles parce que nous allons leur imposer. Tous les meurtres qu’ils commettent, tous les pillages qu’ils commettent… Non ! Non au hold-up ! Si je meurs aujourd’hui, ne vous contentez pas de m’enterrer et mettre des gerbes de fleurs. Il faudra continuer la lutte jusqu’au bout», a-t-il poursuivi.
Selon les résultats du Conseil constitutionnel, l'ex-candidat du MRC est arrivé deuxième (14,23% des suffrages) derrière Paul Biya, réélu pour un septième mandat consécutif avec 71,2% des voix.