Mariée et mère d’enfants, cette jeune camerounaise de 33 ans, a décidé de se lancer dans la fabrication du savon et de plusieurs autres produits d’entretien. Une activité encore embryonnaire mais, malgré les difficultés rencontrées, elle ne baisse pas les bras et assume avec maestria, son rôle de femme au foyer, de mère et de chef d’entreprise.
- Merci madame de répondre à nos questions. Pourrait – on en savoir un peu plus sur vous ?
C’est moi qui vous remercie pour l’opportunité que vous m’offrez. Je suis Ngo Loulouga Marie Josette, épouse Nogha. J’ai un DEUG en Droit privé obtenu en 2016 et, je réside dans la ville de Douala et, c’est d’ailleurs là que j’ai implanté ma petite entreprise.
- Justement, parlant de cette entreprise, pouvez – vous nous en dire plus ?
Je suis patronne d’une petite entreprise qui a pour marque : ASA. Nous proposons trois produits phares, notamment le savon ASA – l’Eau de Javel ASA et, le vinaigre ASA.
- Dites nous, comment est née l’idée de création d’une entreprise, surtout dans ce domaine ?
C’est au mois de mai 2018 que j’ai eu cette idée, c’est dire que je commence juste. Mon parcours, depuis ma sortie de l’école n’a pas été un long fleuve tranquille. Après quelques expériences plus ou moins concluantes dans d’autres secteurs d’activités source de revenus, j’ai eu envie de ma lancer dans la fabrication de mes propres produits. Dans la même foulée, je me suis inscrite pour bénéficier des formations auprès de ceux qui avaient la maîtrise de cet art et, dès que je me suis sentie assez armée, je me suis lancée.
Le problème d’emballage se pose auprès de quasi majorité des jeunes entrepreneurs et, je dois vous avouer que j’ai commencé avec des emballages plutôt rudimentaires. Mais, de l’avis de mes clients qui se recrutent au sein des personnes que je n’aurais même pas soupçonné, les produits que je propose leur donne entière satisfaction. Ils m’ont encouragé à persévérer et, parce que je suis ouverte à la critique constructive, surtout, je pense avoir acquis une certaine maturité et, les produits ASA sont eux aussi, de plus en plus sollicités.
- Avez-vous dû faire face à quelques difficultés ?
Enormes difficultés. La difficulté majeure reste et demeure le manque de financement. J’ai véritablement eu du mal à commencer, à cause du manque d’argent pour financer mon activité.
La deuxième difficulté et non la moindre, c’est le masochisme, les préjugés. J’ai reçu des attaques verbales, vraiment acerbes venant de mon entourage. Les gens se posent toujours la question de savoir par exemple, ce qui peut pousser une madame tel à chercher son autonomie. Il existe tellement de préjugés que d’aucuns le prennent comme une humiliation, une insulte à mon ménage.
- Comment parvenez – vous à y faire face ?
Je me suis tirée d’affaire. La difficulté liée au financement reste présente. La famille, les amis, après les incompréhensions relevées plus haut, sont désormais mon plus grand atout. Ils sont devenus mes premiers consommateurs.
J’ai pu surmonter les préjugés et le masochisme lorsque j’ai réussi à sortir, pour la toute première fois, cette marque qui, dans peu de temps, va devenir une référence sur l’ensemble du triangle national. Vous savez, dès lors que vous mettez du cœur, de la passion dans ce que vous faites, lorsque les personnes qui ne vous ont pas fait confiance de prime abord, se rendent comptent qu’au-delà de l’aspect pécuniaire, vous aimez ce que vous faites et vous vous souciez du bien être de vos clients, ce sont les premiers à faire votre publicité. Les hommes autour de moi, par exemple sont moins méprisants et, ils ont loué mon courage, au regard de la modicité de mes moyens.
- Avez-vous sollicité des partenariats auprès des pouvoirs publics ou alors des organismes internationaux ?
Non, pas encore
- Vous avez participé aux foires ou foras organisés par les pouvoirs publics et mêmes des acteurs privés, pour promouvoir le made in Cameroun. Quel est le sentiment que cela a fait naître en vous ?
Cela m’a énormément encouragé. Vous savez, il y’a tellement de compétences au Cameroun. Une véritable mine d’or très peu exploitée. Le made in Cameroun existe bel et bien et, ce n’est pas du n’importe quoi, contrairement à ce que pensent nos propres compatriotes, obnubilés et complexés par l’Occident, je le dis pour le regretter.
Tenez par exemple, en dehors des produits ASA, nous avons l’huile rouge de Nguei, le poivre blanc de Penja …Ce sont quelques illustrations pour dire qu’il y’a d’excellents produits au Cameroun. C’est une grande ouverture pour les femmes, quelque que soit leur rang social, qui doivent prendre ou reprendre confiance en elles et dévoiler davantage tout leur savoir faire.
- Parlez nous de vos ambitions à plus ou long terme
Mon ambition à moyen terme est de travailler à la vulgarisation de la marque ASA au Cameroun, en Afrique et pourquoi pas en dehors du continent. Il faut bien commencer quelque part et je reste positive.
A long terme, faire partie des femmes qui démontrent la valeur de la femme africaine, cette femme forte qui malgré toutes les difficultés doit porter à bout de bras ses enfants (son rôle de mère, d’éducatrice), son foyer (son rôle d’épouse, de confidente), sa famille (la fille, la mère, la sœur, la tante) et son entreprise (le boss, la femme compréhensive et humaniste avec une touche de fermeté).
- Un dernier mot ?
Mon conseil, très humblement, je dirais croire en soi, avoir confiance en ses capacités tout en ayant conscience de ses limites, bien s’entourer, ne jamais se décourager, persévérer malgré les obstacles et enfin, confier tout ce que nous sommes ou envisageons de faire à Dieu car, de toutes les façons quoi qu’on dise, après toutes nos actions bonnes ou mauvaises, il reste et demeure le seul artisan de nos vies.
Entretien mené par Nicole Ricci Minyem